La Saga d’Erik Le Rouge

   

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Extraites en 2011 de la fort peu visitée bibliothèque de la Pléiade par les éditions Gallimard, la saga d’Eiríkr le Rouge et la saga des Groenlandais sont parmi les textes les plus connus au monde. Qui n’a jamais fait référence à ce célèbre viking qui aurait visité le Canada bien avant Jacques Cartier ? Impossible de dire où se trouve la part de vérité car une saga, même si elle se base (en général) sur des faits réels, est avant tout un récit fictif d’aventure et de bravoure.
Les deux récits racontent sensiblement la même histoire, la seconde se penchant plus sur les voyages qui ont été faits dans le Vinland. Son emplacement reste aujourd’hui assez débattu, les chercheurs penchant pour une zone entre la Nouvelle Écosse et l’île de Terre-Neuve.
La première saga est plutôt difficile à aborder du fait des très nombreux noms qu’on y trouve. Il faut attendre quelques chapitres pour voir l’action s’éclaircir et les personnages se définir.

 

« Il y avait un homme qui s’appelait Thorvaldr ; c’était le fils d’Ásvaldr fils d’Úlfr, fils de Thórir aux bœufs. Son fils s’appelait Eiríkr le Rouge. »

Si vous aimez les présentations de personnages avec livret de famille inclus sur cinq générations, vous serez comblés. Il faut tout de même un petit moment pour rester concentré sur l’histoire en cours et ne pas essayer de déchiffrer l’arbre généalogique de tous les personnages.
Eiríkr est le premier viking à voyager vers le Groenland pour s’y fixer. Comme toute colonisation, il a bien fallu que de pauvres marins ballottés par les flots se retrouvent par hasard sur des terres inconnues. C’est donc sur foi d’une légende qu’il s’y rendra avec ses hommes. Il faut dire qu’il n’avait pas vraiment le choix, ayant été banni pour trois années des terres d’Islande pour avoir tué plusieurs hommes. Le thing, sorte d’assemblée des hommes les plus puissants sinon les plus riches de la région, en avait décidé ainsi.
La première saga nous rapporte des passage de cette aventure, de la vie au Groenland et de leurs expéditions vers le Vinland, mais traitant souvent de personnages différents, ce qui rend la lecture un peu difficile. On n’en reste pas moins émerveillé à la lecture de cette scène de divination, unique en son genre, ou bien de poésie scaldique.

 

« Les poutres du thing du métal ont dit
Lorsque je vins jusqu’ici
Que j’aurais la meilleure boisson.
Il me sied de jeter un blâme aux gens.
Le Týr du chapeau de Bildr
Est obligé de porter le sceau ;
Point de vin sur mes moustaches ;
En revanche il faut que je rampe jusqu’à la source. »

Le propre de cette poésie ancestrale est de faire au plus compliqué, en remplaçant les éléments les plus importants du récit par des métaphores. Ce petit passage est déclamé après que le poète a été obligé d’aller chercher de l’eau pour la troupe : le thing (conseil, rassemblement d’hommes) du métal (armés) est la bataille, ses poutres, les hommes (guerriers). Bildr doit être Ódin (le dieu de beaucoup de choses et portant de très nombreux noms), son chapeau est le casque qu’il porte, le Týr du casque est le guerrier (Tyr étant le dieu de la guerre), l’homme, ici le poète.
Cette strophe, une fois comprise, est plutôt amusante. Eh oui, on rigole aussi dans les sagas.
Les manuscrits d’origine sont perdus et ce sont des copies datant du 12e siècle environ qui ont été retrouvées. Elles sont donc plus récentes et marquées par le christianisme, qui apparaît vers 800 ap. J.C.. Beaucoup d’allusions y sont faites, et si certains hommes sont encore « païens » on ne se prive pas de le signaler. C’est cependant un détail minime pour cette aventure, qui raconte les expéditions au Canada du fils d’Eiríkr, Leifr et un norvégien du nom de Thorfinnr Karlsefni.
Malgré ces quelques difficultés c’est un ouvrage abordable, particulièrement pour une première lecture de saga. On prend un malin plaisir à découvrir les aventures de ces hommes d’un autre temps.
Ce type de récit est très représentatif de la littérature médiévale islandaise, prolifique à cette époque.

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